Un peu de technique

La manœuvre est l’art de gouverner un navire.


La manœuvre consiste, pour celui qui la dirige, à donner des ordres de barre et à régler l’allure des machines et d’une manière générale à diriger l’équipage, afin de placer le navire dans une position prédéterminée, en toute sécurité. La difficulté réside dans la prise en compte de tous les paramètres qui contribuent aux mouvements du navire.
Les navires évoluent à l’interface de deux fluides : l’eau et l’air.
L’eau exerce sur la carène une force hydrostatique permettant au navire de flotter et une force hydrodynamique (liée à la vitesse, à la forme du navire et à l’état de la mer) aussi appelée résistance de carène qui s’oppose à ses mouvements.
L’air ou plus concrètement le vent apparent (mouvement relatif des particules d’air par rapport au navire) exerce sur les œuvres mortes une contrainte aérodynamique (liée à la vitesse de l’air et au profil que le navire présente au vent).
Les écoulements de ces deux fluides sont souvent instables et fortement marqués par des turbulences qui compliquent l’analyse scientifique des contraintes exercées. L’eau, 850 fois plus dense et 100 fois plus visqueuse que l’air a lors des transits en mer une action rapidement prédominante sur le navire dès que celui-ci prend de la vitesse ou dès qu’il y a des vagues.
Dans les ports, à l’approche des quais, le plan d’eau est abrité et la vitesse du navire doit être très faible. Ce sont alors les effets du vent qui deviennent déterminants. L’instabilité du milieu dans lequel le navire se déplace et la faible puissance de sa machine comparée à son poids justifient qu’il est réellement plus complexe d’en maitriser les trajectoires et la vitesse que de gérer celles de tout autre moyen de transport, sur terre ou même dans les airs.

Comment traduire la complexité des évolutions d’un navire?


La manœuvre d’un navire peut s’appréhender comme l’analyse des évolutions d’un solide en interaction avec les fluides en mouvement qui l’entourent.

Les données à prendre en compte sont particulièrement nombreuses. Elles sont liées au navire, à ses équipements, à sa puissance, à son poids, à son chargement mais aussi à la topographie de l’environnement portuaire, au vent et à la mer… Finalement un très grand nombre de paramètres, plus ou moins influents, principalement instables, font que chaque manœuvre est un cas unique difficilement reproductible. Il est donc très difficile d’exposer une théorie précise sur ces forces que le manœuvrier doit toutefois parfaitement connaître. Dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres nécessitant de l’anticipation, le déterminisme et les statistiques doivent cohabiter. L’approche déterministe implique de quantifier l’importance des phénomènes physiques qui sont en jeu pour anticiper leurs effets sur le navire. L’approche probabiliste impose de la pratique et de l’expérience pour analyser des situations comparables.

Lors des manœuvres, en particulier des grands navires actuels dont la longueur est voisine de quatre cents mètres, l’importance des risques d’accident et de pollution n’autorise pas l’improvisation. Une approche rigoureuse et professionnelle s’impose et renforce l’obligation de la présence d’un pilote capable d’anticiper le comportement du navire afin de conseiller efficacement le capitaine. La pratique reste en effet le moyen le plus efficace d’acquisition de l’expertise nécessaire à la manœuvre.

 

 

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